L’immixtion de la société mère dans les relations contractuelles d’une filiale (Cass. Com., 9 nov. 2022, n°20-22.063)
- Par jurisactuubs
- Le 22/01/2024
- Dans Droit des sociétés
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Article publié le 22 décembre 2022
l ressort de l’article 1842 et de l’ancien article 1165 du Code civil qu’une société, dite société mère, n’est tenue de répondre des dettes de sa filiale qu’à la condition qu’elle se soit immiscée dans les relations contractuelles de cette dernière et que cette immixtion ait été de nature à créer une apparence trompeuse pour le cocontractant, laissant supposer que la société mère était également cocontractante.
Une jurisprudence constante de la Cour de de cassation a posé ce principe à plusieurs reprises[1]. Dans un arrêt en date du 3 février 2015[2], la Haute juridiction avait notamment retenu que tel était le cas lorsque la société mère détenait la majorité du capital de la filiale et que le domicile, l’adresse électronique, et le dirigeant, étaient similaires pour les deux sociétés[3]. Dans un arrêt en date du 9 novembre 2022[4], la Cour de cassation est venue préciser une nouvelle fois les contours de la notion d’immixtion de la société mère dans les relations contractuelles d’une filiale.
En l’espèce, la société Santé restauration services avait conclu un contrat avec la société Clinique, société détenue à 99% par la société Santé actions. La société Clinique avait alors été mise en demeure de payer diverses factures par la société Santé restauration services. La société Santé actions avait finalement réglé l’une des factures. La société Santé restauration services avait ensuite assigné en paiement la société Santé actions pour les factures impayées restantes.
Par un arrêt rendu en date du 10 septembre 2020, la cour d’appel de Paris condamne la société Santé actions à régler certaines sommes au titre des factures impayées, en sa qualité de société mère, alors même qu’elle n’était pas engagée contractuellement auprès de la société Santé restauration services.
La société Santé actions a donc formé un pourvoi en cassation.
Dès lors, il était demandé à la Cour de cassation si le paiement partiel de la dette d’une filiale par la société mère caractérisait une immixtion de celle-ci dans les relations contractuelles de la filiale.
Dans sa décision du 9 novembre 2022, la Cour de cassation rappelle à nouveau que la société mère est tenue de répondre de la dette de sa filiale dès lors qu’elle s’immisce dans les relations contractuelles de cette dernière d’une telle manière que le cocontractant de la filiale pense légitimement qu’il est également cocontractant de la société mère.
En revanche, elle précise ici que « le paiement partiel, par la société Santé actions, d’une dette que sa filiale avait été mise en demeure de payer, ne saurait, à lui seul, caractériser une immixtion de cette société de nature à créer, pour la société Santé restauration services, une apparence trompeuse propre à lui permettre de croire légitimement que la société Santé actions s’était substituée à sa filiale dans l’exécution du contrat ».
En retenant que le seul paiement partiel d’une dette d’une filiale par la société mère ne constitue pas une immixtion de nature à créer une apparence trompeuse pour le cocontractant, la Cour de cassation précise les contours du principe. Finalement, il apparait que la non immixtion retenue par la Haute juridiction dans cet arrêt puisse se justifier par les caractères partiels et urgents du paiement de la dette de la filiale par sa société mère. Dans une telle situation, l’immixtion ne peut être caractérisée.
[1] Cass. Com., 12 juin 2012, n°11-16.109
[2] Cass. Com., 3 février 2015, n°13-24.895
[3] Cathalo P., “Groupe de sociétés : le paiement partiel d’une dette ne suffit pas à substituer la société mère à sa filiale dans l’exécution du contrat », Lexbase [En ligne], 16 novembre 2022, Disponible sur : https://www.lexbase.fr/article-juridique/89759284-breves-groupe-de-societes-le-paiement-partiel-d-une-dette-ne-suffit-pas-a-substituer-la-societe-mer
[4] Cass. Com., 9 novembre 2022, n°20-22.063
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