La force majeure ne peut pas être invoquée par le créancier de la prestation inexécutée
- Par jurisactuubs
- Le 22/01/2024
- 0 commentaire
Article publié le 17 février 2021
Dans un arrêt rendu en date du 25 novembre 2020 (Cass. 1re civ., 25 novembre 2020, n° 19-21.060), la première chambre civile de la cour de cassation a décidé que la partie à un contrat qui, du fait d’un événement de force majeure, n’a pas pu profiter de la prestation qu’il a payée ne peut pas obtenir l’anéantissement du contrat en invoquant cet événement.
Pour rappel, en application de l’article 1218 du code civil, alinéa premier, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.
En l’espèce ici, des époux souscrivent et paient un hébergement auprès d’un établissement de cure thermale mais ils doivent interrompre leur séjour de manière anticipée en raison de l’hospitalisation de l’un d’eux.
Soutenant n’avoir pu profiter d’une grande partie de leur séjour en raison d’une circonstance revêtant les caractères de la force majeure, ils demandent la résolution du contrat.
Par un jugement rendu en dernier ressort le 27 mai 2019, le tribunal d'instance de Manosque fait droit à la demande des époux.
La société décide de former un pourvoi en cassation. Selon elle, si la force majeure permet au débiteur d’une obligation contractuelle d’échapper à sa responsabilité et d’obtenir la résolution du contrat, c’est à la condition qu’elle empêche l’exécution de sa propre obligation. Les difficultés de santé de M. X ne l’empêchaient aucunement d’exécuter l’obligation dont il était débiteur, mais uniquement de profiter de la prestation dont il était créancier. La société considère que le tribunal d’instance a violé l’article 1218 du Code civil.
Dans un arrêt en date du 25 novembre 2020, la haute juridiction valide l’argumentaire de la société. « Il en résulte que le créancier qui n'a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure. »
C’est la première fois que la Cour de cassation applique les dispositions du Code civil sur la force majeure issues de l’ordonnance du 10 février 2016 ayant réformé le droit des obligations.[1]
La force majeure, qui peut être non seulement une cause d’exonération de responsabilité mais aussi une cause de résolution de plein droit d’un contrat, suppose que le débiteur soit empêché d’exécuter son obligation. Il en résulte que le créancier, empêché de bénéficier de la prestation, ne peut pas l’invoquer pour obtenir l’anéantissement du contrat.[2]
Avant l’ordonnance de 2016, la Cour de cassation avait jugé au contraire qu’un élève ayant conclu un contrat d’enseignement, qui ne pouvait plus suivre les cours pour des raisons de santé, avait valablement pu cesser de payer les frais de scolarité[3].
Mais cette décision était isolée et il a été jugé que le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut pas s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure[4].
Cyprien CAUX
force majeure Droit des contrats
Ajouter un commentaire