Décryptage. Le contrôle URSSAF

        

Le contrôle URSSAF

Interview de Léonore MARIE, Juriste en cabinet d’avocats

 

Publié le 16 mai 2023

 

1 - Quelles entreprises ou activités l’URSSAF est-elle susceptible de contrôler ?

De façon générale, les inspecteurs de l’URSSAF peuvent contrôler toute personne lui versant des cotisations.

Sont donc notamment concernés par ces contrôles les employeurs, personnes privées ou publiques y compris les services de l'État (à l’exception des membres du Gouvernement et de leurs collaborateurs) et les travailleurs indépendants.

À ma connaissance, aucun secteur n’est plus visé qu’un autre concernant les contrôles URSSAF.

Dans le cadre de ces contrôles, ils vérifient l'assiette, le taux et le calcul des cotisations.

 

2 - Quels sont les enjeux de ces contrôles ?

L’URSSAF réalise ces contrôles pour les raisons principales suivantes :

  • garantir une équité entre les cotisants et les remettre dans leurs droits ;
  • lutter contre la concurrence déloyale entre les entreprises ;
  • garantir le financement du système de protection sociale.

En effet, les cotisations sociales servent notamment à alimenter les diverses branches de la sécurité sociale.

A titre d’exemple, dans son rapport de 2021[1] mis à jour en juillet 2022, l’URSSAF Caisse Nationale, précise comment sont réparties les cotisations récoltées :

Sur 100 € perçus, sont par exemple dépensés :

  • 39,4 € pour la maladie ;
  • 28 € pour la retraite ;
  • 9,9 € pour la famille ;
  • 7,7 € pour l’assurance chômage ;
  • 6,3 € pour l’autonomie ;
  • 3,3 € pour le remboursement de la dette sociale.
     

3 - L'URSSAF est-elle tenue d'un certain nombre d'obligations préalablement à ces contrôles ?

Avant tout contrôle, l'inspecteur du recouvrement doit envoyer au cotisant contrôlé un avis de passage mentionnant sa venue dans l’entreprise (sauf en cas de recherche de travail dissimulé) ainsi que l’existence de la “charte du cotisant contrôlé”, qui est un document opposable à l’URSSAF .

À ce titre, cet avis de passage doit, selon l’article R.243-59 du Code de sécurité sociale, être adressé au moins 15 jours avant la date de la première visite de l'agent chargé du contrôle. Or la charte du cotisant contrôlé, opposable à l’URSSAF prévoit un délai de 30 jours.

Il est donc intéressant de vérifier ce point lors des contrôles URSSAF.
 

4 - Quelles formes prennent les contrôles ?

Les contrôles URSSAF portent sur l’année civile en cours et les trois précédentes. À titre d’exemple pour un contrôle diligenté en février 2023, l’inspecteur du recouvrement pourra contrôler l’année 2023, ainsi que la période courant du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2022. Les contrôles peuvent être réalisés sur pièces (a) ou sur place (b).

  1. Contrôle sur pièces

Le contrôle sur pièces est réservé aux employeurs et travailleurs indépendants comptant moins de 11 salariés.

Le contrôle est réalisé sur la base des documents transmis, notamment, les documents sociaux, comptables, fiscaux et juridiques demandés lors de l’avis de contrôle. Ces documents doivent être transmis sous forme papier ou de façon dématérialisée.

  1. Contrôle sur place

L’inspecteur du recouvrement peut réaliser le contrôle au sein de l’établissement contrôlé.

À l’instar du contrôle sur pièces, il demandera au sein de l’avis de passage la mise à disposition d’un certain nombre de documents, qu’il pourra par la suite demander de compléter. Il pourra également auditionner les personnes rémunérées par l’employeur notamment sur le montant de leur rémunération et sur les avantages en nature dont ils bénéficient.

Lors de ce contrôle, l’inspecteur peut proposer à l’employeur de recourir à la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation. Cette proposition doit intervenir 15 jours avant le début de la vérification. Ce dernier peut refuser pendant ce délai de se voir appliquer cette méthode.

Le cotisant est associé aux quatre phases de la procédure :

  • la constitution de la base de sondage ;
  • le tirage aléatoire d’un échantillon ;
  • l’examen de l’échantillon au regard du point de législation vérifié ;
  • l’extrapolation à la population ayant servi de base à l’échantillon.

En effet, il peut présenter à l’inspecteur du recouvrement des observations tout au long de la mise en œuvre de cette méthode. Si le cotisant exprime son désaccord par écrit à l’une des phases précitées, l’agent chargé du contrôle est dans l’obligation de lui répondre.
 

5 - A quelles sanctions s’exposent les contrôlés ?

Les cotisants contrôlés s’exposent à un redressement au principal des sommes qu’ils auraient dû verser à l’URSSAF. En outre des majorations et pénalités de retard peuvent être appliquées aux cotisations.

Deux types de majorations sont appliquées à la suite d’un contrôle de l’URSSAF :

  • la majoration initiale de 5 % appliquée au montant total des charges sociales redressées qui sanctionne l’absence d'assujettissement spontanée des éléments qui auraient dû l’être ;
  • la majoration complémentaire de 0,2 % appliquée au montant des charges sociales dues, selon le nombre de mois ou fraction de mois écoulés à compter de la date d'exigibilité des cotisations et contributions en cause. Cette dernière prend la forme d’intérêt de retard, décompté à partir du 1er février de l'année qui suit celle au titre de laquelle les régularisations sont effectuées, qui peut être réduite à 0,1 % en cas de paiement dans les 30 jours suivant l'émission de la mise en demeure.
     

6 - Quelles irrégularités recherche-t-elle en priorité ?

À ma connaissance, les inspecteurs URSSAF doivent vérifier tout élément pouvant entrer dans l’assiette des cotisations et contributions sociales.

Je n’ai pas pu identifier les irrégularités recherchées en priorité.
 

7 - Quelles sont les erreurs classiques commises par les entreprises susceptibles d'être sanctionnées ?

Les entreprises sont régulièrement sanctionnées sur l'application de la réduction générale des cotisations patronales.

Elles le sont également régulièrement sur l’exonération de charges sociales des indemnités de ruptures conventionnelles. En effet, ces indemnités sont exonérées dans certaines limites d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales et de CSG-CRDS, lorsque le salarié n’est pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire.

À l’inverse, si le salarié est en droit de bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légal obligatoire, aucune exonération fiscale ou sociale n’est admise.

L’URSSAF considère dans ce cas que pour tout salarié d’au moins 55 ans, l’employeur doit être en mesure de fournir tout document permettant de justifier son absence de droit au régime précité. Or de nombreux employeurs ne récupèrent jamais ces documents. En l’absence de ces documents justificatifs, l’URSSAF redresse l’entreprise et fait entrer dans l’assiette de cotisation la totalité de l’indemnité de rupture conventionnelle versée.
 

8 - Les entreprises contrôlées peuvent-elles contester les sanctions prononcées ?

Les entreprises peuvent bien évidemment contester le contrôle URSSAF. Pour cela, elles doivent suivre un processus spécial.

Suite au contrôle, l’inspecteur devra envoyer une lettre d’observations, à laquelle le cotisant pourra formuler des remarques dans un délai de 30 jours (ou 60 jours s’il en fait la demande). Si le cotisant fait le choix d’adresser ces remarques, l'inspecteur sera dans l’obligation de lui répondre.

À la suite de cet échange, l’inspecteur émettra une mise en demeure. Pour la contester, le cotisant doit saisir la commission de recours amiable (CRA) dans un délai de 2 mois suivant sa réception.

En cas d’absence de réponse dans les 2 mois, le cotisant contrôlé peut considérer que la CRA a rendu une décision implicite de rejet.

Le cotisant pourra alors saisir le tribunal dans un nouveau délai de 2 mois suivant la décision implicite ou explicite de la CRA.

La contestation pourra porter tant sur la forme du contrôle que sur le fond.

 

 

Propos recueillis par Hoël Rival

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[1] Ce rapport est accessible sur le lien URL suivant < https://www.urssaf.org/files/Ressources%20documentaires/RA_URSSAF_2021-WEB.pdf > (consulté le 12/01/2023), pour une vision plus complète se référer à la page 16.

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