La nullité d’une promesse de vente immobilière de longue durée à défaut d’acte notarié est relative
- Par jurisactuubs
- Le 22/01/2024
- Dans Droit des contrats
- 0 commentaire
Article publié le 8 février 2021
Par un arrêt en date du 26 novembre 2020, la 3e chambre civile de la Cour de cassation a rendu une décision inédite : seule la partie qui promet de vendre peut demander l’annulation pour défaut d’acte notarié d’une promesse de vente immobilière d’une durée supérieure à dix-huit mois.
En l’espèce, un propriétaire a loué un appartement à un couple pour une durée de trois ans. Par un protocole sous seing privé annexé au contrat de bail, les parties avaient convenu de la vente de l’appartement dans un délai maximum de vingt-quatre mois, (délai prolongé ensuite de douze mois).
Après commandement de payer les loyers, le propriétaire a assigné le couple locataire en résiliation du bail, expulsion et paiement de diverses sommes. Les locataires ont sollicité reconventionnellement la nullité du protocole.
Par un arrêt en date du 7 février 2019, la cour d’appel de Pau a rejeté leur demande d’annulation du protocole et de résiliation du bail, et les a condamnés solidairement à payer diverses sommes au titre des arriérés de loyers et des indemnités d’occupation, et a ordonné leur expulsion.
Le couple locataire a donc formé un pourvoi en cassation. Ils invoquent la nullité absolue du protocole, non constaté par acte authentique, contrairement à ce qu’exige l’article L. 290-1 du Code de la construction et de l’habitation.
Ce dernier dispose que « toute promesse de vente consentie par une personne physique et portant sur un immeuble ou un droit réel immobilier, dont la validité est supérieure à dix-huit mois, ou toute prorogation d’une telle promesse portant sa durée totale à plus de dix-huit mois est nulle si elle n’est pas constatée par un acte authentique »
La Cour de cassation a également rejeté leur demande. Elle explique que les dispositions de l’article L 290-1 du Code de la construction et de l’habitation ayant pour objet « la seule protection du promettant qui immobilise son bien pendant une longue durée, la nullité encourue en raison de leur non-respect est relative » et seul le promettant peut l’invoquer.
Cette solution est inédite. En effet, l’exigence d’un acte authentique est requis pour toutes les promesses de longue durée, même si elles sont synallagmatiques[2], ce qui était le cas en l’espèce, comme l’ont retenu les juges du fond.
La nullité relative ne peut être demandée que par « la partie que la loi entend protéger[3] ». Et ici, c’est bien le promettant dont le bien est immobilisé pour une longue durée que le législateur a voulu protéger. L’intervention d’un notaire permet en effet de s’assurer de la lucidité du consentement du promettant personne physique dont le bien sera en conséquence immobilisé pendant plus de 18 mois.
C’était donc en vain que les locataires (et bénéficiaires de la promesse) invoquaient le caractère absolu de la nullité.
Il résulte de la solution retenue que la promesse nulle « peut être ratifiée par le promettant ou que celui-ci peut renoncer à l’action en nullité[4] ».
Rappelons pour conclure que la distinction des nullités relatives et nullités absolues était, jusqu’à l’ordonnance du 10 février 2016, implicitement prévue par la loi, le Code civil ne contenant jusqu’alors aucune théorie générale sur la question. « Elle n’en était pas moins constamment appliquée en jurisprudence, et tenue pour acquise par la doctrine. Dans un souci d’accessibilité du droit, cette distinction est désormais expressément consacrée par les articles 1179 s. du Code civil [5] ».
Cyprien Caux.
nullité promesse de vente Acquisition immobilière Droit des contrats
Ajouter un commentaire