Articles de jurisactuubs

  • Loi du 9 décembre 2016 : Regard sur certaines dispositions du droit des sociétés

    Article publié le 4 janvier 2017

     

    La loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique n°2016-1691 du 9 décembre 2016 dite « loi SAPIN II » a été publiée au journal officiel le 10 décembre 2016. Elle vient ratifier une ordonnance du 17 mars 2016 dont le but est d'adapter le droit français à deux textes européens (la directive du 16 avril 2014 et un règlement de la même date).

    Outre des dispositions très médiatisées sur les lanceurs d'alerte et sur la lutte contre la corruption, cette loi contient également des dispositions dans des secteurs variés tels que le droit bancaire et financier, le droit fiscal et le droit des sociétés. Seules les mesures relatives au droit des sociétés seront abordées dans le présent article.

    Pour les dispositions relatives aux Sociétés Anonymes (SA)

    Si dans les SA à conseil d'administration, les cessions d'immeubles par nature, de participation ou constitution de sûretés ne sont pas soumises à autorisation préalable, il en est autrement dans les SA à directoire et à conseil de surveillance où une telle autorisation est nécessaire. (L. 225-68 Code de commerce).

    Cette différence entre les types de société anonyme est supprimée par l'article 142 de la loi SAPIN II pour aligner le régime des divers types de SA. Ainsi, seuls les cautions, avals et garanties continueront de faire l'objet d'une autorisation du CA ou du CS, exception faite des sociétés exploitant un établissement bancaire ou financier.

    Sur le déplacement du siège social :

    Avant l'entrée de la loi SAPIN II, le Conseil d'administration ou le Conseil de surveillance ne pouvait déplacer le siège social de la société que dans le même département ou dans un département limitrophe et cela devait être ratifié par la prochaine Assemblée Générale Ordinaire (AGO).

    La loi SAPIN II modifie cela. Ainsi, cette prérogative est étendue à l'ensemble du territoire français et soumise à une décision ultérieure des actionnaires, comme prévu par les articles L.225-36 et L.225-65 du Code du commerce.

    Les changement prévus sur la désignation du commissaire aux apports

    Pour les Sociétés par Actions simplifiées :

    A la constitution de la société, les associés pourront décider à l'unanimité que le recours à un commissaire aux apports ne sera pas obligatoire pour évaluer un apport en nature lorsqu'il n’excédera pas un montant fixé par décret ou si la valeur totale des apports en nature non-soumise à évaluation n'excède pas la moitié du capital (prévu par l'article L. 227-1 5° du Code de commerce).

    Pour pallier les excès qui pourraient survenir, la loi prévoit qu'en l'absence/différence d'évaluation, les associés seront solidairement responsables pendant 5 ans à l'égard des tiers de la valeur attribuée aux apports en nature (Article L.227-1 7°).

    On peut ici remarquer que le régime des SAS est donc rapproché de celui des SARL en matière d'apports en nature.

    Pour les sociétés à responsabilités limitées (SARL) :

    Comme vu précédemment, l'article L. 223-9 du Code de commerce permet aux associés, à l'unanimité, de se passer du recours à un commissaire aux apports pour les apports en nature.

    Le changement prévu par la loi SAPIN II se trouve à l'article 144 et prévoit une extension aux apports en nature réalisés en cours de vie sociale.

    Ainsi, la situation des apports en nature au moment de la constitution de la société est étendue. Les associés qui seront responsables de l'évaluation au moment de la constitution, seront donc aussi responsables des apports en nature réalisés en cours de vie sociale.

    Pour ce qui est des procédures collectives :

    L'article L.651-2 1° du Code de commerce prévoyait, en cas de faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif, que le ou les dirigeant(s) pouvaient êtres condamnés à supporter tout ou partie du montant de cette insuffisance d'actif et à une interdiction de gérer.

    Cependant, la loi SAPIN II est venue assouplir les modalités de l'engagement de la responsabilité du dirigeant en ajoutant : « toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée» à la fin du premier alinéa.

    Ainsi, dans un objectif certain d'encouragement à l'entrepreunariat, la responsabilité du dirigeant pour insuffisance d'actif se voit visiblement atténuée.

    Cette loi qui vise aussi à moderniser la vie économique semble donc avoir de bonnes idées, il faudra cependant attendre un peu pour en saisir l'impact sur le fonctionnement des sociétés.

    Jordy SASSUS-BOURDA

    Loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016

    Directive 2014/56/UE du Parlement Européen

    Réglement N° 537/2014 du Parlement Européen

    Ordonnance n° 2016-315 du 17 mars 2016 relative au commissariat aux comptes

    Loi Sapin II- Dispositions en droit des sociétés

    http://www.lexplicite.fr/loi-sapin-ii-dispositions-droit-societes/

  • L’impossible dissolution judiciaire de la société pour mésentente sans paralysie du fonctionnement

    Article publié le 10 février 2023

     

     

    Cass. Civ 1, 18 janvier 2023, n°19-24.671

     

     

     

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  • Regard sur la garantie autonome en cas de scission de société

    Article publié le 17 février 2017

     

    La scission/fusion d’une société entraîne sa dissolution sans liquidation et la transmission universelle de son patrimoine à la société bénéficiaire. Cette règle est établie par les articles L 2321 du Code civil et L. 236-3 du Code de commerce. Cependant, la Cour de cassation vient de décider que, sauf convention contraire, la garantie autonome qui ne suit pas l’obligation de garantie n’est pas transmise en cas d’une scission ou en cas d’absorption par voie de fusion à la société bénéficiaire.

    En l’espèce, les 26 octobre et 9 novembre 2004, la société Hôtel les Grandes Rousses a donné son fonds de commerce d’hôtel-bar-restaurant en location gérance à une deuxième société, la société HMC Les Grandes Rousses. Le 3 novembre 2004, cette dernière, en exécution du contrat, a remis à la société Hôtel les Grandes Rousses une garantie à première demande consentie par une caisse régionale du crédit agricole.

    Pendant le cours du contrat de location gérance, la première société a fait l’objet d’une scission emportant transmission de la branche d’activité de l’hôtel au profit d’une autre société. La société HMC ayant résilié le contrat, l’autre société, après de vaines mises en demeures auprès de cette dernière, a par lettre du 30 juin 2011 demandé à la banque de mettre en œuvre la garantie à première demande puis l’a assignée en paiement.

    La Cour d’appel de Pau, dans un arrêt du 19 mars 2015, donna raison à la société saisissante.

    Les juges de la Cour d’appel ont ainsi retenu que, sauf clause contraire, la transmission universelle du patrimoine qui résulte d’une opération de fusion ou de scission n’est pas incompatible avec le caractère intuitu personae de la garantie première demande.

    Dès lors, il était constaté que la société Hôtel les Grandes Rousses bénéficiait d’une telle garantie et avait fait l’objet d’une scission à compter du 1er novembre 2005.

    La garantie accordée au titre de la location-gérance de l’hôtel se rattachant à l’activité hôtelière cédée, il n'y avait lieu ni de mentionner l'existence de cette garantie dans l'acte de scission, ni de recueillir le consentement exprès de la banque sur le transfert de garantie.

    La chambre commerciale par sa décision du 31 janvier 2017, cassa purement et simplement l’arrêt d’appel au visa des articles 2321 du code civil et L. 236-2 du code de commerce.

    Analyse :

    Pour rappel, la garantie à première demande est un acte en vertu duquel, un bénéficiaire est susceptible d’exiger le paiement d’une somme d’argent déterminée auprès d’un organisme garant (souvent une banque) dès la première demande.

    De cette décision de cassation à la solution lapidaire, lapidaire car elle renvoie seulement aux articles précités, nous pouvons en déduire que, sauf convention contraire, la garantie autonome, qui ne suit pas l'obligation garantie, n'est pas transmise en cas de scission de la société bénéficiaire de la garantie.

    Cette nouvelle solution résulte de la nature même de la garantie. En effet, la nature de la garantie est indépendante de l’obligation garantie. En l’occurrence, l’opération de fusion ou de scission (ici une transmission de patrimoine de manière universelle) ne peut pas faire échec à ce principe. Pour pallier cela, il faudrait insérer une clause contraire dans l’acte de garantie ou une acceptation du garant pour y déroger en vertu de l’article 2321 4° du code civil.

    Il faut cependant rappeler que si cette solution est nouvelle, elle n’est pas transposable en présence de cautionnement. En effet, le cautionnement ayant un caractère accessoire par rapport à l’obligation garantie, il sera transmis de plein droit à la société absorbante ou bénéficiaire de la scission en même temps que l’obligation. Cependant et il faut le souligner, la caution ne sera pas tenue des dettes postérieures à la fusion sauf si elle en a manifestée la volonté expresse.

    Jordy SASSUS-BOURDA

    Sources :

    Cour de cassation, chambre commerciale 31 janvier 2017 n°15-19158

    Editions Francis Lefebvre, la Quotidienne, « Une garantie autonome au profit d'une société scindée ne se transmet pas par l'effet de la scission », 14 février 2017

  • Difficultés sur l’identification des bénéficiaires effectifs des sociétés

    Article publié le 9 février 2018

     

    L’ordonnance du 1er décembre 2016 a créé le registre des bénéficiaires effectifs. Ce dispositif a été mis en place pour lutter contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Un décret 1 est venu apporter des précisions sur les modalités entourant le dépôt et le contenu de ce document. Ce dispositif est obligatoire pour toutes les entités nécessitant une immatriculation au Registre du commerce et des sociétés.

    Il est important de souligner que cette obligation est d’actualité puisque les entités créées avant le 1er août 2017 doivent régulariser leur situation en déclarant ce registre avant le 1er avril 2018, sous peine de sanction pénale.

    Pour information, un bénéficiaire effectif est « la ou les personnes physiques qui détiennent, directement ou indirectement, plus de 25% du capital ou des droits de vote de la société ou exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur les organes de gestion, d’administration ou de direction de la société ou sur l’assemblée générale des associés. »2.

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