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Loi immigration et lutte contre les « marchands du sommeil »
- Par jurisactuubs
- Le 29/04/2024
- Dans Dossier spécial (2024): Le logement
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( Loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration )
Les personnes étrangères en situation irrégulière sont particulièrement vulnérables en matière de logement, car même si elles ne disposent que de faibles ressources, elles ne peuvent accéder à un logement social. L’exploitation de leur besoin de logement constitue l’une des nombreuses sources de revenus illicites liées à l’immigration illégale.
En réponse à cette réalité, la loi « immigration » du 26 janvier 2024 a introduit des mesures visant à lutter contre les bailleurs de logements dangereux ou insalubres, communément dénommés « les marchands du sommeil ». Ces dispositions s’appliquent dès lors que la victime est considérée comme une « personne vulnérable », le législateur ayant pris la décision d’inclure les ressortissants étrangers en situation irrégulière dans cette catégorie.
Ce choix effectué par le législateur est surprenant. Jusqu'à présent, la notion de personnes vulnérables était utilisée en droit civil ou en droit pénal, mais ni le simple fait d'être étranger, ni la situation d'irrégularité n'avaient été considérés comme constituant une situation de vulnérabilité. Habituellement, des conditions supplémentaires telles que la minorité ou l'état de santé étaient nécessaires pour caractériser cet état.
Alors, au milieu d’un texte qui fait le choix de la répression se glissent des avancées en matière de lutte contre l’habitat indigne1.
D’une part, l’article 54 de la loi renforce la sévérité des peines prévues par les articles L 511-22 et L 521-4 du Code de la construction et de l’habitation, qui s’appliquent aux bailleurs de logements indignes, lorsque les victimes sont des étrangers en situation irrégulière.
En vertu de l'article L 511-22-I, le refus délibéré d’exécuter des travaux incombant au bailleur est puni d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 50 000 €. Toutefois, la loi « immigration» ajoute que cette peine est portée à deux ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende lorsque la victime est une personne vulnérable, notamment un ressortissant étranger en situation irrégulière.
L'article L 511-22-II prévoit deux ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende en cas de non-respect de la mise en demeure concernant la sur-occupation des locaux. La loi "immigration" élève cette peine à trois ans d'emprisonnement et 100 000 € d'amende lorsque la victime est un ressortissant étranger en situation irrégulière.
De même, l'article L 511-22 III du Code de la construction et de l’habitation prévoit qu’est puni de trois ans d'emprisonnement et d'une amende de 100 000 € le fait de dégrader intentionnellement des locaux dans le but d’en faire partir les occupants ainsi que le non-respect délibéré d'une interdiction d'habitation. La loi "immigration" porte ces peines à cinq ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende.
L'article L 521-4 du Code de la construction et de l’habitation sanctionne de trois ans d'emprisonnement et d'une amende de 100 000 € diverses infractions, telles que la contrainte exercée sur un occupant pour renoncer à ses droits ou la perception illégale de loyers. La loi « immigration » durcit ces sanctions à cinq ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende.
Selon le Conseil d’Etat, ces sanctions pénales sont de portée limitée, ce qui soulève des difficultés d'application et suscite des interrogations sur leur contribution effective à la répression des infractions mentionnées.
D’autre part, l'article 55 de la loi prévoit l'octroi d'une carte de séjour temporaire "vie privée et familiale", d'une durée d'un an, aux ressortissants étrangers en situation irrégulière engagés dans une procédure pénale contre leur bailleur. Cette carte peut être renouvelée pendant toute la durée de la procédure. Cette mesure est motivée par le constat que les ressortissants étrangers en situation irrégulière hésitent à déposer plainte de crainte de perdre leur logement.
Eva THEBAULT.
SOURCES :
- Loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration
- Conseil d’état, Avis sur un projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, 1 février 2023. Disponible sur Avis sur un projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (conseil-etat.fr)
- Y. Rouquet, Loi « immigration » et habitat indigne, Dalloz Actualité, 1 février 2024. Disponible sur Loi « immigration » et habitat indigne - Immobilier | Dalloz Actualité (dalloz-actualite.fr)
1L’habitat indigne est définit par l’article 225-4 du Code pénal comme « toute situation d’habitat portant atteinte et contraire à la dignité humaine ».
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La portée de l'effet interruptif de prescription dans la procédure de surendettement des particuliers
- Par jurisactuubs
- Le 25/04/2024
- Dans Droit des affaires
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(Civ. 2e., 8 févr. 2024, n°23-17.744)
Par un arrêt de cassation en date du 8 février 2024, publié au bulletin, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation se prononce sur la portée de l’effet interruptif de prescription de la décision de recevabilité au bénéfice de la procédure de surendettement des particuliers.
Par acte notarié du 20 mai 2009, un établissement bancaire consent un prêt à une société, garanti par un cautionnement solidaire. Le 28 janvier 2014, une commission de surendettement à déclaré recevable la demande de la caution tendant au traitement de sa situation de surendettement. Par jugement du 30 septembre 2015, un tribunal d’instance a homologué les mesures préconisées par la commission, lesquelles prévoyaient un moratoire de paiement des dettes pendant 24 mois (2 ans), le temps de vendre un bien immobilier.
Le 12 novembre 2018, l’établissement bancaire fait délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière. Le 26 février 2019, la caution sollicite de nouveau le traitement de sa situation de surendettement. Par jugement du 13 mai 2020, le tribunal judiciaire de Perpignan déclare recevable sa demande. Par jugement du 8 décembre 2021, ce tribunal, saisi de la contestation de l’état du passif du débiteur, décide que l’action de la banque, au titre de sa créance, est prescrite. Pour les juges du fond, au regard de la déchéance du terme du prêt intervenu en janvier 2013, la prescription quinquennale était acquise en janvier 2018, à défaut de fait interruptif se déduisant de la procédure de surendettement.
L’établissement prêteur s’est pourvu en cassation.
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation casse et annule le jugement du 8 décembre 2021. Elle rappelle qu’il résulte de l’article L.331-3-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n°2013-672 du 26 juillet 2013, que la décision de recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement emporte suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur.
Ainsi, c’est assez logiquement que l’on peut lire que « le créancier qui recherche l'exécution d'un titre notarié ne peut, à compter de la décision de recevabilité du débiteur au bénéfice de la procédure de surendettement des particuliers, interrompre la prescription en diligentant une procédure d'exécution ». Cette position réduit drastiquement les possibilités pour interrompre la prescription extinctive.
Les magistrats du quai de l’horloge rappellent que la recevabilité de la demande de traitement d’une situation de surendettement vient créer un cas dans lequel le créancier ne peut légalement pas empêcher la prescription de courir.
La loi interdit au créancier d’engager une voie d'exécution, on ne saurait alors lui reprocher de ne pas avoir interrompu le délai de prescription de cette manière, car cela n’est n’a pas été autorisé par le législateur.
Le Code de la consommation prévoit, à l’ancien article L. 311-1 désormais repris à l’article L. 722-2 depuis l’ordonnance du 14 mars 2016, une suspension et une interdiction des procédures d’exécution.
Dorian GABORY
Sources :
- HELAINE Cédric, « Surendettement des particuliers et prescription extinctive », [en ligne], Dalloz actualité, février 2024, [consulté en février 2024]. https://www.dalloz-actualite.fr/
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La présomption en faveur du déposant d’un dessin ne peut être renversée que par la revendication de son auteur
- Par jurisactuubs
- Le 25/04/2024
- Dans Droit de la propriété intellectuelle
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Cass.com., 31 janvier 2024, n°22-20.409, publié au bulletin
Dans un arrêt de cassation en date du 31 janvier 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle que l’enregistrement d’un dessin fait peser sur le déposant une présomption de propriété qui lui permet d’agir en contrefaçon. Il revient au véritable créateur d’en présenter la preuve contraire par revendication.
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La présence des articles détaillant le formalisme du contrat de consommation conclu hors établissement insuffisante à l’information du consommateur
- Par jurisactuubs
- Le 23/04/2024
- Dans Droit de la consommation
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Civ. 1re, 24 janv. 2024, n° 22-16.115
(Cet article est rédigé sous une approche différente de l'article portant sur le même arrêt commenté par Léna RABILLARD :
"L’admission de la connaissance du vice du contrat conclu hors établissement : revirement de jurisprudence en faveur du consommateur")
Le droit de la consommation est une matière relativement contemporaine. En effet elle trouve ses premières sources dans les années 1970. Ce droit a été créé pour réduire l’inégalité d’information entre le professionnel et le consommateur. Il protège donc grandement le consommateur en créant notamment de nombreuses présomptions à son avantage ou en rajoutant des informations obligatoires que le professionnel doit transmettre lors de la conclusion du contrat.
En l’espèce, un consommateur avait conclu un contrat hors établissement le 7 avril 2016 avec une société pour la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques. Ce contrat est financé par le prêt d’une banque souscrit le même jour. Le consommateur découvrant des irrégularités dans le bon de commande demande l’annulation du contrat ainsi que du prêt.
La Cour d’appel de Douai dans arrêt du 25 novembre 2021 fait droit à la demande de requérant. La société et la banque se pourvoient en cassation.
La société estime sur le fondement de l’ancien article 1338 du Code civil que le contrat a été exécuté de manière volontaire par le consommateur en connaissance des irrégularités du bon de commande. Pour elle cette connaissance des irrégularités nait de la présence de manière « parfaitement lisible » au sein du contrat des articles « L. 111-1, L. 111-2, L. 121-17, L. 121-18, L. 121-18-1, L. 121-18-2, L. 121-19-2, L. 121-21, L. 121-21-2 et L. 121-21-5 du Code de la consommation » qui régissent le formalisme du contrat hors établissement. La présence de ces articles est, pour la société, la preuve que le consommateur est averti, ce qui lui fait perdre sa protection de consommateur.
La première chambre civile de la Cour de cassation rejette le pourvoi dans un arrêt du 24 janvier 2024 et confirme l’interprétation de la cour d’appel estimant que les articles précités « dans des caractères de petite taille mais parfaitement lisibles, étaient insuffisants en eux-mêmes à révéler à l'acquéreur les vices affectant ce bon ».
Cet arrêt sonne peut-être la fin d’une tergiversation de la Cour de cassation ces dernières années sur le sujet. En effet de nombreux acquéreurs se servaient de ce moyen pour résoudre ou annuler le contrat de prêt relié à un contrat de consommation erroné. Pour éviter cette dérive la Cour de cassation s’est montrée plus stricte envers le consommateur depuis 2019. C’est dans ce cadre qu’en 2020[1] elle admet pour la première fois que la reproduction des anciens articles L.121-1 et suivants du Code de la consommation pouvait engendrer la connaissance du vice au moment de la conclusion du contrat pour le consommateur. Cette position sévère n’a pas été reprise dans un arrêt du 20 avril 2022[2], au sein duquel elle revient à une interprétation protectrice pour le consommateur. Un énième revirement de jurisprudence dans un arrêt du 31 août 2022[3], confirmé depuis le 1er mars 2023[4] a eu lieu. La position de la Cour de cassation avant cet arrêt était donc que « la reproduction lisible, dans un contrat conclu hors établissement, des dispositions du Code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à ce type de contrat, permet au souscripteur de prendre connaissance du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions ». Cette solution est d’ailleurs reprise au sein de l’arrêt étudié. Toutefois, les juges effectuent un dernier revirement de jurisprudence estimant que la présence des articles était insuffisante pour que le consommateur repère les irrégularités du fait de la taille des caractères. Dorénavant, les juges du fond devront procéder à une observation in concreto des contrats conclus hors établissement afin de savoir si le consommateur avait une connaissance effective du vice ou non.
Ce revirement est en réalité assez logique. La Cour de cassation veut avec cet arrêt « uniformiser le régime de la confirmation tacite et de juger ainsi dans les contrats souscrits antérieurement comme postérieurement » à la réforme du 10 février 2016.
Cette évolution est saluée par la doctrine d’autant que la solution la mentionne. La Cour de cassation revient à une certaine orthodoxie du droit de la consommation qui vise justement à protéger la partie faible qu’est le consommateur.
Hugo SOUESME
Sources :
C. HÉLAINE, « Contrat conclu hors établissement et nullité », Dalloz actualité, 02 février 2024, https://dalloz.ezproxy.univ-ubs.fr/documentation/Document?id=ACTU0221301
J. LASSERRE CAPDEVILLE, « Crédit affecté : revirement attendu concernant la connaissance des irrégularités du contrat principal ! », La Semaine Juridique Edition Générale, n° 06, 12 février 2024, act. 193